"Up above the world I fly, like a tea tray in the sky"

Bienvenue dans mon humble demeure. Essuyez-vous les pieds en sortant.

vendredi, août 21, 2009

Parity of esteem


Chaque soir à mon retour à la maison, je suis accueilli par cette phrase : Did you get a lot of work done today? Et je ne sais jamais trop quoi répondre. Alors je réponds je ne sais trop quoi.

N’allez pas croire que la Linen Hall Library n’est faite que de vieilles pierres et de bois car ce n’est pas vrai, c’est même inexact pour ne pas dire globalement faux. La Linen Hall Library n’est donc pas la bibliothèque de mes rêves mais je l’aime bien quand même, et c'est finalement ça le plus important.

Je n’ai jamais vu de temps aussi versatile qu’ici, c’est incroyable, on ne sait où donner de la tête. Je lève les yeux, soleil éclatant, resplendissant de majesté, à peine le temps de les baisser que déjà il pleut, averse monstrueuse ou torrentielle, je détourne le regard pour bientôt sentir la chaude caresse du soleil, nuages percés de lumière éblouissante, presque irréelle, mais aussitôt l'averse s'abat de nouveau, trombes d'eau se déversant sur des milliers de parapluie, déluge de pluie comme pour rincer les rues des litres de sang versé, 1521 morts de 1969 à 2001, certainement plus depuis, de quoi repaître un vampire pour une ou deux éternités.
Lame
Belfast. Plus de 1500 morts donc, en trente ans de conflit mais des gens qui font la queue pour attendre le bus, tranquillement, sans trop se bousculer ou se piquer la place. Si l’on reste dans le centre ville, ce qui est ma foi mon cas, il est presque impossible de s’imaginer la violence insensée qui a marqué le quotidien de cette ville pendant toutes ces années. Des manifestations de haine pure, sans nuage de lait ou de sucre pour l'adoucir, c’est effrayant, vraiment effrayant, je vous passe les détails, j’ai lu des choses que je ne suis pas prêt d’oublier, nauséabond, inconcevable. La haine bordel. Tout n’est pourtant pas fini, même dans le centre ville moderne et bien sapé, repu de subventions européennes, les dernières alertes à la bombes remontent au mois de mars 2009, et il y en aura d'autres. Il est temps de tourner la page, de changer d'habits, nouvelle teinture, nouvelle respectabilité, mais il y a des détails qui ne trompent pas, tant de choses qui persistent, le Diable n'est-il pas supposé se cacher dans les détails ?
Des détails donc
Il y a une ou deux semaines nous sommes descendus à Dublin, Baile Átha Cliath, afin d’assister à un quart de finale de football gaélique entre les comtés de Meath et de Mayo et à une demi-finale de hurling entre les comtés de Kilkenny et de Waterford. Croke Park Stadium, 80000 places asises, le temple du sport gaélique. 63000 spectateurs pour ces deux matches, un truc de fou, des familles et des familles, du grand-père au bout de chou, tous bardés des couleurs de leur comté, dans une ambiance chaleureuse, c’était bien. Croke Park et la Gaelic Athletic Association, qui interdisait jusqu'à peu à ses membres de jouer à des sports anglais, rugby ou football. Nous y sommes allés. Nous c’était moi et lui, enfin un autre lui, nous l’appellerons T., et T. il est protestant. Et le nombre annuel de protestants qui assistent à des matches gaéliques il ne doit pas dépasser le nombre de doigt d’une gueule-cassée. Car oui, tout divise ici, tout divise. Si tout le monde joue au football – car le football est un sport universel, un langage planétaire, un exemple unique au monde de contre-américanisation – il y a autant de catholiques qui jouent au cricket ou de protestants qui pratiquent le hurling que de compassion dans le cœur de Jean-Marie Le Pen. Tout divise, du moins presque tout. La religion la politique la culture le territoire le sport l’éducation mais où va-t-on ? Même mes mots que l’on emploie divisent, Derry/Londonderry, 6 counties/Ulster, quoique l’on fasse on est amené à prendre partie, obligé, il est presque imposible de rester en équilibre sur le grand mur de brique rouge qui sépare les deux communautés, avec ses rouleaux de fil barbelés et ses inscriptions délavées, c’est bien trop glissant, vraiment casse-gueule, on ne peut pas résister éternellement, on tombe de l’un ou de l’autre côté, fatalement.
Tout de même
Mais tout n’est pas perdu non, tout n’est pas perdu. Il y a ce jeune homme à l’accueil du troisième étage, juste sympa, pas sympa dans le sens sympa, mais sympa dans le sens bien, empathique, bien, quelqu’un de bien, de sympa quoi, alors on reprend espoir, ou on n'en reprend pas, c'est au choix.

3 remarques pertinentes:

At 18:38, Anonymous GM said...

pépé est triste en ce moment; il ne mange plus : protestant, loyaliste, catholique, unioniste .. je pense qu'il hésite
bon sinon je dirais que repu de subventions européennes ... cela fait un brin condescendant non? je n'irai pas jusqu'à ... quoique

 
At 20:51, Blogger Nat pepeR said...

Si ça te fait plaisir qu'on dépense tes impôts pour construire des complexes commerciaux rutilants à Belfast c'est ton problème, saleté de gaucho, vous êtes bien tous les mêmes.

 
At 22:50, Blogger Mouette sans frontières said...

Une éternité ou deux.
Je note, c'est joli.
Ca fait un peu Chuck Norris, mais c'est joli.

 

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